Cependant, si l'on ajoute à ce décompte les 152 versions privées du B737, produites sous l'appellation
« BBJ », ainsi que les exemplaires destinés à l'armée américaine et qu'on ne se limite donc plus aux avions de
lignes commerciaux, la famille 737 conserve une petite avance de 20 appareils à fin juillet, avec un total de
12.171 exemplaires produits, selon Boeing. Une avance qui devrait avoir totalement fondu fin août ou début
septembre, Airbus produisant près de 60 moyen-courriers de type A320 par mois, contre 38 B737 par mois
pour Boeing.
En revanche, le Boeing 737-800, l'un des 14 modèles de la famille 737, conservera encore longtemps le titre
d'avion de ligne le plus vendu au monde, avec 5.174 exemplaires livrés depuis son lancement en 1998. Contre
4.752 pour le best-seller d'Airbus, l'A320 CEO classique, et 2.232 pour son successeur, l'A320 NEO, entré en
service en 2016.
Un millier d'appareils prévus initialement
Il aura donc fallu trente-sept ans à l'A320 et ses dérivés pour égaler le chemin parcouru par les 737 en
cinquante-huit ans. Ce qui ne figurait même pas dans les rêves les plus fous de ses promoteurs. En 1984,
lors du lancement du projet A320, Bernard Lathière et Roger Béteille, deux des pères fondateurs d'Airbus,
espéraient vendre un millier d'A320 et prendre 25 % à 30 % du marché. Aujourd'hui, l'avionneur a enregistré
19.285 commandes pour la famille A320, dont 7.134 restent encore à livrer.
L'A320 aura pourtant eu une gestation compliquée. À l'étude dès la fin des années 1970, sous le nom de code
A200, ce projet de famille d'avions moyen-courriers européens, offrant une alternative au Boeing 737 et au
DC-9 de Douglas, se heurte au scepticisme des Allemands, qui auraient préféré donner la priorité à un
quadriréacteur long-courrier.
Boeing tente de séduire Airbus
Il se heurte aussi aux manœuvres de la concurrence. En France, Dassault tente de sauver son avion de ligne
Mercure. Aux Pays-Bas, McDonnell fait miroiter une alliance à Fokker, qui ne verra jamais le jour. Boeing, qui
a bien vu le danger, va jusqu'à proposer un partenariat à Airbus autour d'un modèle de 150 places. Pour
finalement lancer une version modernisée du B737, le 737-300.
Le soutien de la direction d'Air France, malgré l'opposition d'une partie de ses pilotes au pilotage à
deux, le ralliement britannique et l'appui jamais démenti des gouvernements français successifs
permettront au programme de surmonter ces difficultés. En misant notamment sur des choix
technologiques de rupture, comme les commandes électriques et l'automatisation malgré deux crashs
mortels au début de sa carrière.
Le point de bascule de 2003
Le véritable point de bascule entre l'A320 et le B737 survient en 2003, quand pour la première fois, les
livraisons d'Airbus dépassent celles de Boeing, grâce à l'A320 alors produit à 38 exemplaires par mois. A
compter de cette date, l'avionneur européen livre tous les ans plus de monocouloirs moyen-courriers que son
concurrent américain, même si ce dernier compense par les livraisons de long-courriers.
En 2019, le carnet de commandes de la famille A320 dépasse également, pour la première fois, celui
des Boeing 737. Au succès de la version remotorisée NEO, lancée quelques années avant le Boeing
737 MAX, s'ajoute la crise du B737 MAX qui va creuser un fossé entre les deux avionneurs sur le
marché des moyen-courriers, tant en production qu'en prises de commandes. En 2024, malgré les
difficultés de production, Airbus livre ainsi 602 A320 livrés contre 265 B737.
Depuis le début de l'année, on note néanmoins une franche embellie chez Boeing, qui a livré 246 MAX de
janvier à fin juillet, contre 286 A320 pour Airbus. Mais à fin juillet, le carnet de commandes de l'A320
s'élevait encore à 7.134 exemplaires, contre 4.326 pour le 737 MAX. Et si le record de vente du B737-800
tient toujours, l'A321 NEO semble bien parti pour lui ravir sa couronne d'ici à quelques années. Le nouveau
best-seller d'Airbus totalisait déjà 7.067 commandes à fin juillet, dont 5.280 encore à produire.